Loïc Escoffier (Lodigroup) est ému en arrivant sur les pontons de Pointe-à-Pitre, ému quand il repense au chemin qu’il lui aura fallu parcourir pour arriver à cette victoire sur la Route du Rhum - Destination Guadeloupe, “la quatrième de la famille”... Une émotion toute légitime tant sa course a connu de rebondissements.
« Dans cette classe Rhum Multi, entre Marc Guillemot, Roland Jourdain, Gwen Chapalain, Halvard Mabire, Gilles Buekenhout, il y a des super marins. Gilles a fait une super course… C’est lui qui devait gagner clairement. Je me suis retourné en mer d’Irlande, il y a quatre mois, je sais ce que c’est, on a toujours ça dans la tête. Il y a beaucoup d’émotions à cet instant, car la navigation est très stressante. Quand j’ai appris le chavirage de Gilles, ce n’était pas facile à digérer.
Dans cette classe d’amateurs éclairés, nous avons montré qu’il y avait du match. On se fait mal comme les autres, et plus longtemps. Forcément c’est ce qui fait le charme de la Route du Rhum ! Il a de bagarres dans toutes les classes, je pense à mon frère Kevin (IMOCA – Holcim-PRB) qui est arrivé lui-aussi dans un mouchoir de poche.
Je veux dire un mot pour Etienne Hochédé qui s’est lui aussi retourné en mer d’Irlande, et qui a retapé son bateau sans budget, et qui en ce moment en mer se bat contre Philippe Poupon, c’est beau ! Les Rhum Multi, c’est une catégorie dont on n’a pas fini de parler.
Il y a quatre mois je ne savais pas si je prendrais le départ de cette 12e Route du Rhum. Je m’étais fait hélitreuiller en mer d’Irlande, et heureusement que j’ai des sponsors formidables qui ont voulu y aller. Mais avec ce qu’il m’est arrivé, je n’avais pas le droit à l’erreur. J’ai géré la course avec beaucoup plus de stress. J’étais sur le frein au début. A un moment, j’ai cravaché, j’ai lâché le frein, j’ai dormi avec l’écoute dans la main. Dès qu’il y avait une alarme, j’étais dessus. C’est quand même Jean-Yves Bernot et Tom Laperche qui ont fait ma trajectoire. Tom, il est jeune, c’est le top en Figaro, et Jean-Yves est ce qu’il se fait de mieux sur la planète en termes de routage. Ça, plus les préparateurs, les copains qui ont préparé le bateau, l’histoire est belle…
Je suis un grand optimiste, même au fond du seau, je me dis que je vais y arriver. J’ai renvoyé le code 0 sur la fin, ça s’est joué à rien parce qu’on n’était pas loin avec Bilou (Roland Jourdain). C’est fou de gagner, Francis Le Goff (Directeur de course) m’a prévenu que j’avais gagné la Route du Rhum pour 90 mn de pénalité contre Bilou. Je me retrouve sur le podium avec des mecs dont je nettoyais les carènes quand ils faisaient La Solitaire du Figaro. C’est sympa quand même ! Je vais retourner à la pêche, mais ce qui a été fait là on ne pourra pas me l’enlever. »