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Cartographie en direct

Du fil à retordre

20 nov. 2022 - 14:39|Temps de lecture : 5 min

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Gwen Chapalain - Guyader - Savéol - DR

Ils en avaient rêvé, et pendant ces jours à planter des pieux, les avaient imaginé comme une délivrance. Enfin, depuis trois jours, les marins de la catégorie Rhum sont dans ces fameux alizés, l’autoroute du sud qui doit les mener jusqu’en Guadeloupe ! Sauf que le plan ne se déroule pas tout à fait comme prévu… Certes, les alizés sont bien établis, plutôt forts même jusqu’à 20-25 nœuds, mais ils présentent la particularité d’être très instables en force et en direction. Des oscillations brutales qui obligent les marins à adapter, en permanence, la garde-robe du bateau en permanence.

Et cet exercice leur donne parfois du fil à retordre. Joint à la vacation ce matin, Olivier Nemsguern (Elora) avouait littéralement “galérer” à bord de son Cigale 16 : ”les vents sont super instables. Ils varient entre 10 et 30 noeuds avec des changements de direction de 45-50° et les changements ont lieu toutes les demi-heures, donc soit je suis sous-toilé avec trinquette 1 ris, soit je suis toilé régulièrement et je tente une voile d’avant, le vent monte et je me retrouve avec un bateau intenable ! Je suis à des années lumières des polaires du bateaux. J’ai connu des alizés beaucoup plus sympa ; là je ne prends pas beaucoup plaisir de navigation et de glisse.

Sport toujours en Rhum Multi ou là aussi, ça envoie et ça affale à tour de winch. “Depuis hier après-midi, c'était compliqué sur l'eau avec de forts gains et des variations de vent assez conséquentes, de 15 à 30 nœuds", détaillait Gwen Chapalain (Guyader - Savéol). “Il y a aussi une mer mal rangée, c'est vraiment difficile d'accélérer et trouver le bon compromis de vitesse, sans faire mal au bateau. Je suis passé hier à gennaker grand-voile haute, puis un ris, ensuite génois, et cette nuit pendant deux heures avec le foc de brise et grand-voile un ris . Depuis 04h00 TU, j' ai remis des watts dans la machine, avec le génois, on joue aussi avec les angles du vent, à quelques degrés près autour du 140° du vent, et cela crée beaucoup de vent apparent ou pas.

Même constat à bord d'Ille et Vilaine - Cap vers l’Inclusion pour Fabrice Payen : “Le vent est toujours aussi soutenu entre 22 et 28 nœuds, j'essaye de trouver le meilleur compromis au niveau des voiles. J’essaie parfois d'avoir un peu plus de toile quand ça mollit mais invariablement, je me retrouve surtoilé à mon goût avec un niveau de stress qui me ramène à mes choix quant au ratio risques/intérêts, le but premier étant d'arriver avec le bateau intègre en Guadeloupe…

Sur cette route, les nordistes sont indiscutablement mieux lotis et bénéficient d’une meilleure vitesse de rapprochement. “Ils tirent avantage d’un meilleur angle bâbord amure sur une route proche de l’orthodromie”, expliquait Pascal Scaviner, prévisionniste Météo Consult. Les autres sont contraints de multiplier les empannages dans un alizé très instable et un cap majoritairement au sud-ouest, un peu plus éloigné de la route directe.

Ils ont dit :

Fabrice PAYEN (Ille-et-Vilaine Cap vers l’Inclusion) : “Les journées se suivent et se ressemblent ! On est à 1690 milles de la pointe de la Vigie au nord de la Guadeloupe, l'équipe et la famille prennent l'avion aujourd'hui comme c'était prévu avec un départ initial de la course le 6 novembre, ça leur permettra de s'acclimater et de profiter de la Guadeloupe avant mon arrivée ! Le vent est toujours aussi soutenu entre 22 et 28 nœuds. J’essaie de trouver le meilleur compromis au niveau des voiles, j'essaye parfois d'avoir un peu plus de toile quand ça mollit mais invariablement je me retrouve surtoilé à mon goût avec un niveau de stress qui me ramène à mes choix quant au ratio risques/intérêts, le but premier étant d'arriver avec le bateau intègre à la Guadeloupe...J'ai chaussé la prothèse mécanique et ça fonctionne bien pour les déplacements et manœuvres, plus de recharge de batterie à gérer. Mon moignon va mieux, j'ai eu des ampoules (phlyctènes) dues au frottement et à la perte inévitable de volume et il a fallu les soigner en liaison avec le médecin de la course avant de me retrouver au milieu de l'Atlantique, loin des routes habituelles des cargos si jamais il y avait surinfection. Je suis resté plusieurs jours sur une patte (comme la poule de Guirec Soudée !) sans ma prothèse pour pouvoir sécher et cicatriser la peau en priant pour ne pas que ça s'infecte et que les conditions météo ne m'obligent pas à trop manoeuvrer. Heureusement, j'ai un routeur attentionné en la personne de Christian Dumard qui m'a concocté à cette occasion une trajectoire sud aux environs de Madère pendant plusieurs jours sur le même bord afin de ne pas avoir à chausser ma prothèse! "Tu n'as rien à gagner sur les mers infécondes que souffrance et naufrages" L'Odyssée, Homère."

Gilles Buekenhout (JESS) : “Bonjour à tous. Je prends le temps de ce long surf vers la destination Guadeloupe pour vous transmettre l'ambiance nocturne et le lever de soleil à bord de JESS. En dehors du fait que c'est un peu la thalasso à bord, comme si un gars vous lançait des seaux d'eau à la figure dès que vous pointez le nez dehors, il fait bon, ni trop chaud ni trop froid la nuit. C'est l'agitation et les secousses incessantes qui sont maintenant fatiguantes, une main pour soi, une pour le bateau selon un certain dicton ! L'espèce qui serait la plus adaptée à ce type de navigation serait tripède ou quadrupède ! Bref, souvent à genoux ou assis pour garder l'équilibre, l'organisme encaisse, mais c'est aussi ça qu'on vient chercher : aller au bout de soi-même. La fatigue des premiers jours difficiles de novembre dont on ne récupère pas vraiment, la vigilance des rafales, la veille sécu et les grains qui vont arriver en approche font que cette course est si particulière. Arriver à se faire un petit quelque chose à manger sans se brûler, soigner ses bobos comme disait la medecin, écouter un peu de musique en vous écrivant - incroyable moi qui n'en n'ecoute quasi jamais - en naviguant à l'écoute du bateau ! Tout ceci en surfant à quelques pointes à 17-18 nœuds ! Gilles et JESS.”

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